#CIHA202400861La matière qui parle entre philosophie, sciences physiques et archéologie

D. Les Matériaux de l'Œuvre
Écriture et image. Labilité et résistance de la matière
L. Bachelot 1.
1Centre d’étude de l’écriture et de l’image - Paris (France)


Adresse email : luc.bachelot005@ornage.fr (L.Bachelot)
Discussion

Co-auteur(s)

Sujet en anglais / Topic in english

Sujet de la session en français / Topic in french

Texte de la proposition de communication en français ou en anglais

Mots-Clés: Écriture et matière, rencontre physique, philosophie et archéologie

Il ne se passe pas de jour sans que nous recevions de diverses instances administratives, publiques ou privées, une proposition de "dématérialiser" les documents de papier que nous utilisons pour nos démarches (cartes de fidélités ou d'abonnement, reçus, factures, billets de train, d'avion ou de métro). Toute cette communication se faisait par l'intermédiaire de documents, écrits, le plus souvent faits de papier, mais aussi de carton ou de plastique, sur lesquels étaient manuscrits ou imprimés des textes et des images. De tout cela il semblerait que nous n'ayons plus besoin, alors qu'il s'agit tout de même d'assurer des échanges d'informations strictement identiques à ceux d'hier ou d'avant-hier, y compris d'ailleurs les œuvres d'art exclusivement numériques, authentifiées par les NFT. Nous savons bien que cette "dématérialisation" est largement fictive puisque le papier et l'encre naguère utilisés ont été simplement remplacés par de la fibre de cuivre ou optique et par bien d'autres matériaux composites utilisés pour la fabrication de nos appareils d'émission et de réception. Il n'y a pas eu de "dématérialisation" ou d'abandon de la matière, mais simplement changement de la matière. Mais le caractère métaphorique du terme de "dématérialisation" qui n'est plus contestable et à peine contesté par une petite partie de la population peu attentive ou intéressée par le débat technico-administratif, mais également scientifique, témoigne maintenant d'une vraie problématique qui concerne la nature même et le fonctionnement de tout système de communication. Outre l'existence de deux pôles, l'émetteur et le récepteur, il faut tenir compte également d'un médium (un support) et des outils pour inscrire une marque. Aujourd'hui comme naguère, il s'agit finalement d'un traitement particulier de la matière que  l'on peut qualifier de "manipulation". On choisit un matériau quel qu'il soit afin de le transformer pour en tirer un ensemble de signes, vecteurs d'une signification. Mais nous considérons toujours le matériau comme de la matière inerte, passive, à disposition, en attente d'être saisie et utilisée pour répondre à nos besoins. Mais nous savons maintenant que la matière n'est ni inerte, ni passive et qu'à toutes les échelles elle est dotée d'une énergie considérable (et selon certaines écoles de pensée, qu'elle n'est qu'énergie !). En ne la considérant plus comme nécessairement inanimée, morte en quelque sorte, si nous prenions en considération son dynamisme intrinsèque, sans doute pourrions-nous trouver bien des mécanismes de communication et de transfert qui nous aideraient à mieux comprendre et sans doute mieux "faire" dans le domaine de l'échange d'informations. Pour cela, il faudra évidemment interroger les "sciences de la matière" (Physique des particules, mécanique quantique, notamment) et les conséquences qu'en tire la philosophie qui, contrairement à ce que l'on peut penser, ne sont pas sans incidence sur cette recherche scientifique et l'usage que l'on peut faire des résultats qu'elle obtient. Au dialogue de la philosophie et de la physique, nous inviterons certaines réalisations mises au jour par l'archéologie, la documentation écrite de la Mésopotamie ancienne, entre autres.


Bibliographie

- "Écriture, image et grammatologie", dans Hélène Campaignolle-Catel et Karine Bouchy (dir.) Écriture V, systèmes d'écriture, imaginaire lettré, Presse, Sorbonne nouvelle, 2019, p. 43-59.

- « Aventure et mésaventure de l’écriture », dans Pierobon, Aventure de la  Scrittura, Naples, Centre Jean Berard. 2018, p. 15-37.

- « Corps, images et perception de l’espace. De la Mésopotamie au monde classique »,  dans Nicolas Gillmann (ed.), Corps, image et perception de l’espace, l’apport de la phénoménologie – , Paris, L’Harmattan, 2014. p. 13-31.

« Archéologie et Création artistiques », Dossier Archéologie et Art contemporain, Les nouvelles de l’archéologie n° 134, Paris, Editions de la Maison des Sciences de l’homme et Editions Errance. 2013, p. 47-52.

« Divin regard : note sur le rôle du visible dans la mythologie mésopotamienne », dans X. Faivre, B. Lion et C. Michel, “ Et il y eut un esprit dans l’homme. Jean Bottéro et La Mésopotamie“, Travaux 6 de la Maison René Ginouvès, Paris, De Boccard, 2009, p. 31-40.

« La peur des images » (sous la dir de L. Bachelot et Cl. Pouzadoux), Dosssier n° 23, Bruxellles, La part de l’œil. 2008.

« L’image, la peur et le sacrifice, en Mésopotamie comme   ailleurs… », dans L. Bachelot et Pouzadoux (Ed.), La peur des images, Dosssier n° 23, Bruxellles, La part de l’œil. 2008, p.11-34

« L’invisible du visible », dans L’Arte nel Vicino Oriente Antico- BBellezza, rappresentazione, espressione. Milan, Edizioni Ares. 2005, 117-140.

 


CV de 500 signes incluant les informations suivantes: Prénom, nom, titre, fonction, institution

Luc Bachelot, CR-CNRS, (Retraité)- UMR 7041, Archéologies et Histoires de l'Antiquité, Nanterre

Archéologue du Proche-Orient a participé ou dirigé une quarantaine de missions archéologiques en Iran, Irak et Syrie. Outre ses travaux de terrain, s’est particulièrement intéressé aux questions liées aux « pratiques symboliques » (image et écriture…) des sociétés anciennes du Proche-Orient ancien.

Responsable de 1993 à 1995 d'un séminaire de recherche au Collège International de Philosophie sur le thème de la « Rencontre entre philosophie et archéologie, à propos de l'image et de la communauté »

De janvier 2002 à Janvier 2007, Responsable de l'équipe du CNRS (Paris) « Histoire et Archéologie de l'Orient Cunéiforme (HAROC)  », au sein de 1’Unité Histoires et sciences de l’Antiquité du Centre National de la Recherche Scientifique  (Dir. A.-M. Guimier-Sorbets puis F. Joannès.)

- Membre du CA du « Centre d’étude de l’écriture et de l’image »

Dans le cadre des « Thèmes transversaux de l’UMR ArScAn », a animé, avec Claude Pouzadoux (Université Paris Ouest Nanterre La Défense), pendant dix ans un séminaire intitulé « La peur des images ».  Les contributions à ce séminaire ont été régulièrement publiées dans le Cahier des Thèmes transversaux de l’UMR ArScAn (12 volumes parus).

 

Congrès


Résumé / Abstract

La dématérialisation des documents échangés, censée faciliter la communication, ne cesse de gagner du terrain. Elle est pourtant fictive, puisque les supports naguère utilisés pour l’écriture (papier, carton, plastique, etc.) sont à présent remplacés par d’autres matériaux (fil de cuivre, fibre optique, notamment). La matière demeure donc, et n’est pas, comme on le pensait, inerte et passive dans l’attente d’une manipulation la transformant en signes, mais dotée d’un dynamisme interne (énergie), laissant apparaître un modèle de communication insoupçonné. Ce sont les sciences de la matière (physique des particules, mécanique quantique, entre autres) qui permettent de le comprendre.