Cette communication sera l’occasion de revenir sur le commissariat de l’exposition « Faire avec » présentée au printemps 2023 à H2M, l’espace d’art contemporain de la ville de Bourg-en-Bresse. Cette exposition entendait souligner l’importance de la matérialité dans les pratiques artistiques contemporaines. Bien qu’ils soient indispensables et partie prenante de leurs œuvres, les matériaux utilisés par les artistes sont souvent ignorés, à la fois par le discours produit sur les œuvres mais également par le regard porté sur elles. Ainsi, les dix artistes de l’exposition (Léa Belooussovitch, Michel Blazy, Nicolas Daubanes, mounir fatmi, Léa Le Bricomte, Lucas Leffler, Lionel Sabatté, Andres Serrano, Jérémie Setton et Douglas White) se sont ingéniés à faire avec des matières singulières. Riches de significations, elles venaient au-devant de la représentation, la repensaient, la complétaient ou la remplaçaient parfois.
Sur mon invitation les artistes ont exploré de nouvelles manières d’articuler les images et les matières. Les matériaux singuliers auxquels ils ont recouru n’entendaient pas s’effacer derrière un discours ou disparaître derrière l’image qu’ils supportaient. Au contraire, ils s’imposaient et permettaient d’ouvrir des dialogues féconds entre l’image et sa matérialité. L’image semblait préalablement contenue dans la matière et le geste du plasticien apparaissait comme un révélateur humble du potentiel de la matérialité.
En tant qu’artiste-chercheur, cette exposition découlait naturellement de mes problématiques de recherches plastiques et théoriques. Il s’agira donc, au sein de cette communication, d’interroger également la plasticité même de l’exposition, les enjeux plastiques et sémantiques de l’accrochage ainsi que les questionnements que sous-tend la production d’œuvres spécialement conçues pour une exposition qui entend mettre en avant la matérialité. Certaines œuvres qui existaient préalablement à l’exposition ont été radicalement modifiées par l’accrochage et le contexte thématique de l’exposition qui offraient à ces œuvres une nouvelle modalité d’existence sensible en les reconfigurant plastiquement ou en réorientant leur perception à l’endroit de leur matérialité et de leur potentiel symbolique. La matière se trouvant au carrefour de sa volonté propre, de celle du plasticien, des visées du commissaire et de la réception du spectateur qui était le plus souvent invité à projetée sur elle un imaginaire, donnant ironiquement raison à la remarque de Patrick Vauday dans La Peinture et l’image : "on ne perçoit pas une image sans en quelque sorte l’imaginer, faute de quoi on n’a plus affaire qu’à une simple chose, toile ou feuille de papier."
Article publié :
« Rejeter l’abject » pour le dossier n°120, « L’Abjection », de la revue Dalhousie French Studies, Canada.
en cours de publication :
« Insuffler », catalogue de l’exposition « A pleins poumons », fondation Bullukian, Lyon, (fin 2023).
« Recouvrer la caresse », actes du colloque : « Déchets et rebuts dans l’art contemporain », organisé par Florence Bernard, Frédéric Montégu et Julie Noirot à l’Université Lumière Lyon 2, les 21 et 22 mars 2022. Publication aux presses universitaires de Rennes (fin 2023).
« Less is more than more » actes du colloque international : « Iconomorphoses : appropriation, éthique et partage », organisé par Sophie Aymes, Laureano Montero, Judite Rodrigues-Balbuena, Christelle Serée- Chaussinand, Bénédicte Coste à l’Université de Bourgogne, les 16 et 17 mars 2023 (début 2024).
Dylan Caruso est plasticien. Major de l'agrégation, il enseigne au sein du département Arts Plastiques de l’université Jean Monnet et mène une thèse de doctorat en Arts Plastiques intitulée : « Sécrétion et conflits de représentations » à l’Université de Picardie Jules Verne, sous la codirection d’Éric Valette (UPJV) et d’Anne Favier (UJM).
https://www.u-picardie.fr/crae/dylan-caruso/
https://www.dylancaruso.org/
L''exposition "Faire avec" qui découlait de mes problématiques de recherches, mettait en lumière l''importance de la matérialité dans les pratiques artistiques contemporaines. Les artistes ont exploré la richesse sémantique de la matérialité, usant de matières singulières qui dialoguent avec l''image plutôt que de s''effacer derrière elle. Il s’agira d’examiner la plasticité de l''exposition, les enjeux de l''accrochage et les questionnements liés à la création d''œuvres conçues spécifiquement pour mettre en avant la matérialité. Certains travaux, modifiés par l''accrochage, offrent une nouvelle modalité d''existence sensible, interrogeant la perception de la matière et son potentiel symbolique.